En réponse à une demande formulée en mars 2013 par le ministre de l’Intérieur de l’époque, M. Manuel Vals, M. Francis Messner a produit un rapport sur la formation des cadres religieux musulmans.
Dans son introduction, le rapport souligne que les religions historiques ont été conduites à diversifier les modalités de formation de leurs cadres.
Le rapport présente la formation des cadres religieux en Europe. Aux 18° et 19° siècles, « les Etats, soucieux de contrôler les ministres de la religion, prennent l’initiative de créer eux-mêmes des établissements de formation théologique » (exemples en France de la constitution civile du clergé de 1790, de l’université impériale de 1808 ou de la création de facultés de théologie après l’annexion de l’Alsace par l’Allemagne en 1870). Les objectifs poursuivis par les Etats étaient « d’éviter la constitution de contre sociétés prônant la suprématie…du spirituel sur le temporel…de favoriser l’éducation d’un clergé tolérant, éclairé, ouvert ». Aujourd’hui, ces formations varient selon les statuts des cultes instaurés par chaque Etat et prennent en compte l’islam « en vue de garantir l’égalité en matière religieuse et de préserver la paix religieuse et l’ordre public ». Cette prise en compte s’opère par extension aux nouvelles religions des mécanismes prévus pour les cultes historiques : création d’instituts de formation dans les universités publiques ou conventionnements de structures privées ou cursus intégrant un enseignement de théologie non confessionnelle ; habilitation de diplômes délivrés par des établissements privés de théologie. « Les efforts des pouvoirs publics en Europe…visent en priorité à faciliter l’intégration de l’islam dans les droits nationaux des cultes ». De ce fait, en complément de la formation théologique, des formations à l’intégration ont ainsi vu le jour dans différents pays européens. Elles peuvent être classées en trois catégories : formations civiles et civiques ; formation à l’approche scientifique du fait religieux ; formation au dialogue interreligieux.
Pour la France, où les cadres religieux sont formés sans intervention de l’Etat, sauf en Alsace-Moselle, le rapport préconise :
- de développer la création des diplômes universitaires (DU) destinés à faciliter l’intégration des cadres religieux (notamment musulmans) dans la société française ; de subordonner l’obtention d’un visa pour les ministres du culte étrangers à leur engagement de suivre les enseignements d’un DU (ce qui implique une bonne maîtrise du français) ; de réserver le recrutement des aumôniers rémunérés par l’administration dans l’armée, les prisons et les hôpitaux aux candidats titulaires d’un DU ;
- « d’encourager les établissements d’enseignement privé supérieur de théologie musulmane…de solliciter la reconnaissance d’utilité publique en vue de leur éventuelle reconnaissance par l’Etat en tant qu’établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général » ;
- « d’encourager ces établissements à collaborer avec des universités publiques dans le cadre notamment d’une appropriation des approches et de la méthodologie universitaires » ;
- de procéder à la création de pôles d’excellence en sciences humaines et sociales de l’islam aptes à fédérer et mobiliser les chercheurs ; ces pôles conduiraient des recherches sur tous les aspects du fait religieux musulman ; ils seraient financés par le canal d’un Groupement d’intérêt public (GIP).