Françoise Champion, chercheuse du CNRS, s’est intéressée aux logiques qui ont présidé à l’évolution historique en Europe des systèmes de relations entre l’État et les Églises. Ses travaux l’ont conduite à identifier deux processus : la laïcisation et la sécularisation[1].

La sécularisation est un processus lent et progressif de baisse ou de perte d’influence de la religion dans le fonctionnement du système social, qui affecte aussi bien les croyances, les pratiques que les institutions religieuses. C’est « une mutation socioculturelle globale se traduisant par un amenuisement du rôle institutionnel et culturel de la religion lié, chez les individus, à une baisse de l’appartenance religieuse institutionnelle et des pratiques qui y sont associées (en tout premier lieu, la pratique cultuelle régulière) ».

La sécularisation répond d’une manière générale aux caractéristiques suivantes :

— elle implique une autonomie de l’État par rapport aux Églises ;

— elle entraîne une différenciation fonctionnelle de la société : la religion n’est plus qu’une activité parmi d’autres et ces autres activités (l’enseignement, la santé, l’économie, le politique, etc.) se développent selon leur logique propre, et non plus dans un cadre globalisant proposé par la religion ;

— elle conduit à enlever à la religion des attributions (état-civil, éducation, etc.) qui ne relèvent pas du strict domaine religieux ou à réduire son rôle dans ces domaines ;

— elle se traduit par une privatisation et une autonomisation des croyances ; ces dernières relevant de la sphère privée, quand bien même leur expression peut ne pas y être cantonnée.

Cette logique a prévalu dans les pays de l’Europe du Nord à dominante protestante et a conduit à une évolution de la société généralement sans heurt majeur sur le long terme.

 


[1] Entre laïcisation et sécularisation. Des rapports Eglises-Etat dans l’Europe communautaire, dans Le Débat n° 77, novembre-décembre 1993