Un premier constat est que les pays européens sont confrontés à des situations similaires en ce qui concerne le fait religieux : une sédentarisation de populations immigrées professant des religions auxquelles il faut faire place (l’islam principalement) ; la baisse des pratiques et des vocations qui affecte les religions « traditionnelles » ; l’apparition de nouvelles formes de pratique religieuse (bouddhisme, églises évangéliques) ; un grippage des mécanismes d’intégration dans un contexte de crise économique, qui se traduit souvent par un repli identitaire et des pratiques communautaristes (s’exprimant notamment sur le plan religieux) ; la poussée des intégrismes et extrémismes de tous bords.
Un deuxième constat est que la laïcisation ou la sécularisation n’ont pas signifié la disparition du fait religieux, mais son transfert dans la sphère du privé ou bien encore l’adoption de nouvelles formes d’expression (non liées à une institution ou à une tradition religieuse particulière). La baisse des pratiques ne signifie pas obligatoirement une perte d’influence sociale : les services des Églises ou des structures qui leur sont liées (dans le secteur de l’enseignement par exemple) continuent à être utilisés. Elle ne signifie pas non plus la fin de l’attachement des individus à certaines croyances : c’est ce qu’exprime la sociologue anglaise Grace Davie par la formule « Believing without belonging ».
La persistance du fait religieux et l’intérêt qu’il suscite chez les chercheurs ont motivé la création à Paris en janvier 2015 d’un Centre d’études en sciences sociales du religieux (Césor), au sein de l’Ecole des hautes études en sciences sociales (CHHESS). Ce centre rassemble diverses structures qui existaient antérieurement et regroupe des sociologues, des anthropologues, des philosophes et des historiens. Il a pour objectif de développer le travail interdisciplinaire et de conduire une réflexion sur les méthodes et les concepts. Le Césor sera également appelé à intervenir dans la formation des fonctionnaires français.
Il existe également en France un laboratoire de recherche sur le fait religieux contemporain qui se dénomme Groupe sociétés, religions, laïcités (GSRL) et qui intervient au sein du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et de l’Ecole pratique des hautes études (EPHE). Ce laboratoire est sollicité par l’Etat français sur la gestion du fait religieux. Il procède également à des études comparatives sur la laïcité dans le monde.