Le Président de la République avait demandé au Conseil constitutionnel si la ratification par la France du Traité établissant une constitution pour l’UE nécessitait en préalable une modification de la constitution. Dans sa décision 2004-505 du 19 novembre 2004, le Conseil avait répondu par l’affirmative.

Lors de son analyse (détaillée dans les commentaires sur la décision 2004-505), le Conseil s’était interrogé notamment sur la compatibilité avec la constitution de la Charte des droits fondamentaux de l’Union (incorporée au Traité sous les articles II-61 à II-114).

S’agissant plus spécifiquement de l’article II-70 du Traité qui traite de la liberté de pensée, de conscience et de religion, le Conseil avait estimé qu’il n’était pas en contradiction avec le principe de laïcité. Cet article correspond à l’article 10 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (qui lui-même s’inspire de l’article 9 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales). Le Conseil a fondé son appréciation sur les éléments suivants :

— il y a équivalence de sens et de portée entre les droits reconnus par le Traité et ceux qui le sont par la Charte et par la Convention ; ce qui implique que ces droits se trouvent sujets aux mêmes restrictions, tenant notamment à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé et de la morale publics, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

« Or l'article 9 de la Convention…a été constamment appliqué par la Cour européenne des droits de l'homme en harmonie avec la tradition constitutionnelle de chaque État membre. Elle a ainsi pris acte de la valeur du principe de laïcité inscrit dans plusieurs traditions constitutionnelles nationales et reconnu aux États une large marge d'appréciation pour définir les mesures les plus appropriées, compte tenu de leurs traditions nationales, pour concilier la liberté de culte avec le principe de laïcité ». Le commentaire du Conseil sur sa décision cite dans ce sens l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 29 juin 2004, Leyla Sahin c/ Turquie.